Questions clés

Existe-t-il des inégalités « justes » ?

Nos sociétés ne recherchent pas l’égalité tout court, mais bien l’égalité « juste ». Pas facile à définir.

Publié le 12 janvier 2021

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En pratique, personne ne revendique l’égalité pure et simple. Personne n’ose réclamer l’égalité de niveaux de vie, d’éducation, de loisirs, etc. « L’égalitarisme », montré du doigt par certains, est destiné à servir d’épouvantail : en agitant la crainte du « nivellement » ne justifie-t-on pas encore plus les inégalités ? Nos sociétés ne recherchent pas l’égalité tout court, mais bien une égalité « juste » ou l’égalité « des chances », et ne combattent pas l’inégalité, mais l’inégalité « injuste ».

Pourquoi ? Parce qu’il faut bien répartir la richesse. Pour cela, il faut trouver des critères. En attendant d’atteindre l’abondance (ou un autre principe d’organisation de la société), nos sociétés admettent les inégalités et qu’il est « juste » de partager la richesse en fonction des « efforts », du « travail » ou du « mérite » (compétences, responsabilités, etc.). Si le travail ou l’effort n’était pas le critère de répartition, personne ne voudrait travailler. Dès lors, il n’y aurait plus de production de richesses, et plus rien à partager.

Mais des notions qui paraissent aller de soi comme l’effort personnel ou le mérite sont bien plus complexes qu’il n’y paraît, tant il est difficile de mesurer la part de l’individu et celle de la société dans les actions de chacun (voir "Qu’est-ce que l’équité ?).

En pratique, les sommes mirobolantes touchées par quelques PDG, stars du sport ou de la chanson n’ont pas grand-chose à voir avec leur « effort » ou leur « mérite ». Au passage, la question de « qui » décide de ce qui constitue le mérite (dans l’entreprise par exemple) et de la façon dont on partage, est centrale pour comprendre le fonctionnement de notre société.

A partir de là, le débat sur l’égalité est infini : celui qui estime que les inégalités ne mesurent que des efforts personnels et que le partage est fait de façon équitable n’est pas choqué des écarts qui existent. Au fond, le jugement porté sur le niveau des inégalités ne peut être établi qu’à partir de principes, de valeurs subjectives, qui font, par exemple, qu’il paraît « injuste » à tous (ou presque) qu’un grand patron touche en un an ce qu’un smicard reçoit en plusieurs siècles.

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Date de première rédaction le 22 décembre 2003.
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